AULNOY,

Marie, Catherine Le Jumel de Barneville, baronne d'


NOUVEAUX CONTES DES FÉES. PAR MADAME D**.

La Haye,

Meindert Uytwerf,

1700.

2 tomes en 1 volume in-12 (138 x 70 mm) de 1 frontispice et [2]-244 pp. pour le tome I, et 1 frontispice et [2]-210 pp. pour le tome II ; veau fauve moucheté, dos à nerfs, compartiments ornés de fleurons et fers d’angle (reliure de l’époque).

6 500

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Description

Très rare édition des contes de fées de Madame d’Aulnoy.

Elle est ornée de 2 frontispices de Jan van Vianen et de 10 vignettes en tête de chaque conte, le tout gravé sur cuivre. Des ornements gravés sur bois complètent l’illustration.

Les recueils de Madame d’Aulnoy, qui imposèrent – avec les Contes de Perrault – la mode du genre féérique et sanctionnèrent la « naissance du conte féminin » (Nadine Jasmin), parurent pour la première fois en 1697-98 à Paris chez Claude Barbin, en quatre volumes, sous le titre de Contes des fées. En 1698, une nouvelle série intitulée Contes nouveaux ou les Fées à la mode fut publiée, aussi en quatre volumes, par Catherine Legras et Nicolas Gosselin.

Les exemplaires de ces premières éditions sont aujourd’hui pratiquement introuvables, y compris dans les institutions, où ils sont généralement considérés comme « perdus » ou « non localisés ». (Volker Shröder, de Princeton, a récemment retracé et décrit les quelques exemplaires et fragments qui subsistent dans une série de publications de son blog Anecdota.) Des contrefaçons portant une fausse adresse de « Trévoux » virent le jour quelques mois après les éditions originales : illustrées de bois sans rapport avec le texte des Contes, elles sont aussi d’une extrême rareté.

Les éditions de Meindert Uytwerf, dont nous proposons ici un précieux témoin, prennent la suite des originales et des contrefaçons. Intitulées Les Contes de fées et Nouveaux Contes des fées, elles furent publiées à La Haye entre 1698 et 1700, et sont à peine moins rares que les précédentes.

Cette série de Nouveaux contes, complète en deux volumes, rassemble les récits présents dans les tomes III et IV du premier recueil Barbin, soit : la « nouvelle espagnole » Don Gabriel Ponce de Leon, Le Mouton, Finette cendron et Fortunée pour le tome I, qui comporte aussi une Préface ; Babiolle, Don Fernand de Toledo, Le Nain jaune, la Suite de Don Fernand de Toledo et Serpentin vert pour le tome II. Les vignettes en tête sont reprises du recueil Barbin, mais les beaux frontispices allégoriques de Jan van Vianen ont été gravés spécialement pour cette édition.

Parmi les contes présentés ici, Le Nain jaune, sombre histoire de princesse à marier, de prétendants et de vengeance cruelle mettant en scène un effroyable homuncule dévoré par la jalousie – ce n’est pas le seul récit du recueil présentant un dénouement malheureux –, passera aisément l’épreuve de la postérité, et inspirera même un populaire jeu de société.

Le Contes de Madame d’Aulnoy n’on rien perdu de leur charme, qui tient au savant dosage entre folklore, mythologie classique, imagerie médiévale et renaissante, zoologie fantastique, cruauté, esprit mondain et intentions moralisatrices, le tout exalté par un bonheur narratif auquel la découverte des écrivains réalistes espagnols du Siglo de oro n’est pas étrangère. Ajoutons-y une pincée de féminisme qui s’exprime tout d’abord par la discréditation du mâle. Si, dans leur description, les princes sont charmants, leurs actes révèlent souvent des êtres amorphes. La métamorphose animale suggère également cette veulerie : ainsi, dans le conte intitulé Le Mouton, le prince est transformé en ovidé et se retrouve ainsi victime d’une castration par métamorphose. Par ailleurs, certaines héroïnes n’hésitent pas à se travestir en homme afin de démontrer leur courage, qualité censée être l’apanage exclusif de la gent masculine. Autre marque de ce féminisme sui generis, et non la moindre : la représentation de la « femme de pouvoir », incarnée au premier chef par la fée. Cette dernière, rappelle Furetière dans son dictionnaire (qui venait de paraître en 1690), est l’héritière d’une déesse romaine, Fata, détentrice du destin (fatum). Elle symbolise ici, sous une forme fantasmée et fantastique, le triomphe de la femme et son autonomie souveraine.

Recueil très rare, pratiquement inexistant hors de l’Europe : WorldCat signale les exemplaires de l’Université du Kansas et celui de Princeton (fonds Cotsen), tous deux incomplets du premier frontispice, le second étant considérablement rogné.

Habiles restaurations à la reliure, ainsi qu’au frontispice et au titre de la première partie.

Provenance : Signature à l’encre d’un possesseur anglais : « G. Morgan 1756 ».

Références : Madame d’Aulnoy, Contes des Fées, édition critique établie par Nadine Jasmin, Paris, Champion, 2008. Madame Jasmin n’a pas examiné cette édition (cf. la bibliographie matérielle aux pp. 74-81) ; résumés et analyses détaillées des contes aux pp. 692-701 et 742-767.

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