Description
Édition originale.
Publication très rare, composée dans le style hiératique, enfiévré et facétieux caractéristique du Satie rosicrucien, occultiste et mystique (voire mystificateur).
Elle est illustrée, en page [5], d’un fragment du psaume Intende votis d’Erik Satie noté à la manière de l’Ars Nova.
Satie, fondateur et quasiment unique affilié – avec son ami Contamine de Latour – de l’Eglise Métropolitaine d’Art de Jésus Conducteur, proteste ici contre les détestables et mécréantes productions de Lugné-Poe au Théâtre de l’Œuvre, et contre la presse tout aussi mécréante et détestable « qui l’inspire et le glorifie ». La lettre, d’abord envoyée par la poste à Lugné-Poe, puis imprimée sur papier crème et distribuée par son auteur à la sortie du théâtre, est également adressée à Alfred Vallette, Alexandre Natanson et Léon Deschamps, respectivement rédacteurs en chef du Mercure de France, de la Revue Blanche et de La Plume.
« L’état exceptionnellement prospère de ses finances [un héritage tombé à point nommé] permet à Satie de faire connaître sa prose autour de lui, autrement qu’en en multipliant les copies manuscrites comme à l’époque de sa confrontation avec le directeur de l’Opéra de Paris (…), il utilise à présent l’imprimé. Il en profite pour accompagner ses bulles d’échantillons de sa production musicale » (Ornella Volta).
C’est en 1893, dans les pages de la revue Cœur, dirigée par l’ésotériste Jules Bois, que Satie avait annoncé la création de sa propre église, « temple digne du Sauveur, Conducteur et Rédempteur des peuples », censée abriter les noces de la catholicité et des arts. L’Eglise aura son organe de presse, Le Cartulaire, et son hymne, La Messe des pauvres. La hiérarchie, les costumes, l’abbatiale (la chambre de Satie), les ordres sont conçus et exposés avec force détails.
« Qui pouvait prendre cela au sérieux en dehors d’Erik Satie lui-même ? Il est probable que ces projets visaient surtout à caricaturer l’ordre fondé par le Sâr Péladan. Cette utopie délirante ne dura d’ailleurs pas longtemps, le dernier numéro du Cartulaire fut publié en 1895 et ne fut probablement destiné qu’aux deux seuls membres de l’Église métropolitaine » (C. Rebisse).
Enfin, signalons qu’une première plaquette sur le même sujet, intitulée Commune qui mundi nefas, avait été publiée par Satie le 24 janvier 1895.
On joint deux autres rares documents satiens :
- Une feuille de papier à lettre crème imprimé à l’en-tête de l’Eglise Métropolitaine d’Art de Jésus Conducteur, avec la mention « Erik Satie, Parcier et Maître de Chapelle » (278 x 217 mm) ;
- Un autre papier à lettre, de plus petit format, portant comme en-tête « Désunion des Musiciens de Bas-Étage (sous-sol). Secrétariat (2 ff. in-12, 180 x 115 mm).
Petites taches sans gravité sur la couverture, pli horizontal au milieu des deux documents de l’Eglise Métropolitaine d’Art de Jésus Conducteur.
Documents très bien conservés.
Références : Ornella Volta, Erik Satie. Correspondance complète, Fayard/IMEC, 2000, pp. 57-58 et 952-955. – Christian Rebisse, Erik Satie, maître de chapelle des Rose-Croix (https://www.rose-croix.org).