ARTAUD,

Antonin


Lettre autographe adressée au docteur Jacques La Trémolière

Rodez,

29 avril 1943.

Lettre autographe à la mine de plomb sur un bifeuillet, papier de cahier d’écolier quadrillé, signée « Antonin Nalpas », 4 pages in-8 (18 × 135 mm).

 

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Description

Très belle lettre, mystique et poignante, écrite de l’asile de Rodez.

Artaud se plaint tout d’abord que son médecin ait perdu une lettre contenant des révélations sur la religion catholique, puis se lance dans une longue, poignante apostrophe relevant d’un christianisme hérétique et délirant, où la drogue voisine une douloureuse extase. La lettre est signée « Antonin Nalpas » (Nalpas était le nom de jeune fille de la mère d’Artaud) .

Je vous y disais que Dieu avait jeté l’interdit depuis le commencement du monde sur ce qu’on appelle l’œuvre de la chair et que le 6me commandement de l’Église

“l’œuvre de chair ne désireras

Qu’en mariage seulement”

est absolument faux et contraire à la doctrine véritable de Jésus-christ […]. Dieu n’a jamais voulu d’une humanité dont la chair s’est préparée pendant 9 mois au milieu du sperme et des excréments.

[Il le presse ensuite de lui fournir de la drogue :]

Et si sachant que je souffre et me reconnaissant dans mon travail vous ne parvenez pas à me donner l’héroïne qu’il me faut, et pensez par rapport à moi à la toxicomanie quand je vous demande de la morphine, alors que je suis intoxiqué du sperme et des excréments qui me viennent de tous vos pêchés [sic] à tous, et que c’est de l’opium, de l’héroïne et de la morphine qu’il me faudrait pour m’en guérir, si sachant tout cela vous ne vous décidez pas à me soulager c’est que votre âme ne s’est pas encore délivrée du poison de la Tare originelle que Jésus-christ qui est Dieu est descendu sur terre pour effacer il y a plus de 2 mille ans, et après 2 mille ans ce poison ne s’est pas encore effacé du cœur humain […] et il faut maintenant un autre sacrifice pour achever de consommer le Mystère de la Rédemption… […] voilà ce qu’il vous faut savoir de toute urgence afin d’entrer enfin dans votre salut éternel.

Antonin Nalpas.

Pli horizontal au centre des feuillets avec atteinte à l’écriture sur une ligne de la page [4] ; document fragile, bien conservé dans l’ensemble.

Références: A. Artaud, Œuvres complètes, X, «Lettres écrites de Rodez, 1943-1944», Paris, Gallimard, 1974 (nouvelle éd. 1996), pp. 42-44 (texte intégralement reproduit).

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